Journal du GR10 #1 : les Pyrénées-Atlantiques
Jour 0. Nous sommes à Biarritz dans les Pyrénées-Atlantiques et demain, c’est le grand départ. On regarde les Pyrénées se dessiner au loin et on se dit que bientôt, on y sera. On commence à se projeter, même si on est loin d’imaginer ce qui nous attend…
C’est enfin parti. À la sortie de la gare d’Hendaye, on repère les premières balises du GR10 avec l’âme d’un enfant qui fait une chasse aux trésors. Les premières heures sont difficiles… Le sac est lourd et, dès la première montée, pour juste sortir de la ville, on passe, dans la douleur, du fantasme à la réalité. C’est le moment où l’on comprend que non, tu ne peux pas imaginer avant d’y être. Du haut de notre première côte, on voit l’océan. On réalise que l’aventure commence. On a l’étrange sensation d’aller vite, l’océan n’étant déjà plus qu’un tout petit point bleu au loin. Mais paradoxalement, on prend la mesure de ce qui nous reste à faire. La prochaine fois que nous verrons la mer ne sera pas avant plusieurs semaines et la fin du GR10…
Premiers jours et premiers bobos. Les jambes, les épaules, le dos, les pieds tout nous fait mal, mais il parait que ça passe vite. On se rassure comme on peut. Il faut maintenant trouver son rythme, faire avec la douleur et ne pas oublier de profiter du paysage et de l’expérience. Le temps d’un pique-nique en haut du col des trois fontaines en compagnie des vautours, on fait le point sur la carte pour programmer les prochaines étapes. Un soir, au cœur des montagnes, alors que nous installons notre bivouac, on fait connaissance avec un berger qui court après ses vaches. La seule race de vache encore sauvage en France ! Son aisance dans les pentes nous fait envie, sa bonhomie nous fait plaisir. Il nous apprend qu’un taureau sauvage, traîne dans le coin, mais il paraît qu’il est gentil. Nous voilà rassurés !
Dans le pays Basque, le paysage est varié. On traverse de vastes étendues d’herbe, des cols abruptes et minérales, des crêtes… la seule constante est la présence des chevaux à grelots, les Pottoks, que l’on voit partout, surgissant même de la brume au matin, dans les hauteurs des crêtes d’Iparla. Mais comment sont-ils arrivés là ?
La difficulté de la route se fait sentir, la météo commence à faire des siennes. C’est la fin de la journée et on profite d’une bergerie vide pour poser la tente et échapper au brouillard. Il y a un robinet pour se laver, nous sommes à l’abri pour manger, la soirée s’annonce pas si mal. Comme pour nous réconforter, le matin, le soleil brille et c’est devant une magnifique mer de nuage que nous prenons notre petit déjeuner.
À peine une semaine sur la route pour atteindre notre premier objectif : Saint-Jean-Pied-de-Port. Notre demi-journée de repos s’organise tranquillement entre lessives, visite, discussions avec des pèlerins et gros repas. La ville, qui a su garder son authenticité, est propice à la flânerie et on en profite.
On repart pour quelques jours en totale autonomie, et il est encore bien difficile pour nous de juger nos besoins en nourriture. Et au vu des sept kilos perdus par Vincent dans cette première partie, c’est bien alourdi par nos provisions que nous repartons de Saint-Jean-Pied-de-Port.
Au hasard de la route, nous rencontrons à nouveau un berger. Il faut dire que c’est bien les seuls personnes que nous voyons en dehors des GRdistes. Philippe nous reçoit le soir dans sa cabane pour parler de son métier. En toute transparence, il nous explique sa vie, son travail, sa réalité. Il est heureux et épanoui, ça fait plaisir. Après un petit coucou au bébé âne d’une semaine, c’est l’heure d’aller au lit. Notre tente est installée pour l’occasion à côté de ses cochons.
La brume a décidé de nous accompagner. On avance sans rien voir du paysage, c’est frustrant. Après plusieurs jours, toutes nos affaires sont trempées mais il faut quand même les remettre au matin…
Le soleil fait une apparition furtive le temps de passer la passerelle d’Holzarté, mais en remontant, la brume nous attend de pied ferme. Les aléas de la météo sont difficiles pour le moral. Heureusement un berger (encore un) nous aperçoit et nous propose de dormir dans son ancienne cabane. Une offre qui tombe à pic, on le remercie donc chaleureusement. Certes, elle tombe en ruine mais un bon feu et un bon repas plus tard, le morale est regonflé par la certitude que c’est avec des chaussettes sèches que nous affronterons la journée de demain.
La météo a changé du tout au tout. Les points d’eau se font plus rares alors que la chaleur devient écrasante et nos vivres diminuent déjà… La journée est longue mais nous sommes récompensés à notre arrivée au col Saint-Martin qui nous offre un cadre magnifique pour la soirée. C’est à flanc de falaise que nous dînons. Plus que deux jours avant d’atteindre Borce où nous espérons nous ravitailler.
Les jours suivants sont chauds et le dénivelé raide. Nous passons la soirée en compagnie de Mickaël un GRdiste que nous recroiserons à plusieurs reprises. C’est l’occasion de discuter sur nos motivations respectives qui nous ont poussé dans cette aventure.
Nouvelle pause après 11 jours sur la route. Borce est un village magnifique où le gîte/bar/épicerie nous offre de quoi refaire le plein. Le GR emprunte ensuite le chemin de la Mâture, à flanc de montagne, mais au frais, c’est déjà ça ! Après une partie en forêt, on se lance dans l’ascension du pic d’Ayous. Le sommet passé, le temps se gâte et le tonnerre nous fait accélérer. Arrivés à Gabas, on échappe à la pluie de quelques secondes. À l’abri dans la chapelle du village, on regarde les éléments se déchainer. Rapidement rejoint par un couple de Niortais, nous passons finalement une très agréable soirée ensemble dans la chapelle où nous improvisons un campement de fortune.
Nous partons à l’assaut de la hourquette d’Arre qui culmine à 2465 mètres d’altitude. La montée est longue mais le paysage, très varié, aide a ne pas trop s’en rendre compte. On finit même les pieds dans la neige. Les derniers kilomètres sont très très raides, mais la vue en haut est magnifique ! Encore quelques névés à traverser et des gouttes à esquiver dans la descente. Une cabane nous sauve de l’orage, quelle chance ces deux derniers soirs ! On se fait un petit café bien au sec en regardant la pluie tomber. Le randonneur a des petits plaisirs simples… La pluie s’arrête au bout d’une heure, nous en profitons pour nous laver. La rivière est gelée mais c’est quand même agréable de se sentir propre. Il fait beau maintenant et nous dînons dehors devant notre cabane du soir, qui, bien que minuscule, ne manque pas de charme.
Fin du GR10 dans les Pyrénées-Atlantiques
C’est le dernier jour en Pyrénées-Atlantiques. La sortie de Gourette nous offre l’occasion de prendre une bonne suée avant une descente dans un vallon en plein soleil. La chaleur nous coupe les jambes, on fait une pause. Les vaches très curieuses viennent voir ce qu’on fait… On arrive finalement à remonter pour voir qu’une route faisait tranquillement le tour. Le GR10, des fois, aime bien te compliquer la tâche ! À l’arrivée à Arrens-Marsous, c’est la déception. Le magasin vient de fermer et ne rouvrira ses portes que dans 3 heures. Nous n’avons pas envie d’attendre. Des randonneurs sympas nous dépannent un peu de pain et des tomates car nous n’avons presque plus rien. Il est temps de repartir direction Estaing et les Pyrénées Centrales !
À suivre…