Journal du GR10 #4 : les Pyrénées Orientales

C’est le dernier tronçon du GR10. Nous oscillons entre excitation et appréhension. Il reste dix jours, mais dans notre tête, tout s’accélère. Les Pyrénées Orientales ont la réputation d’être plus clémentes, nous espérons en profiter pleinement !

Départ de Mérens. La route pour le porteille de Bésines est très belle, le changement de région est déjà visible. La physionomie de la montagne change, la végétation aussi. Cela nous surprend toujours de voir la diversité que revêt les Pyrénées. Une pause près d’un refuge nous donne l’occasion d’assister à son ravitaillement. L’isolement oblige un hélico à assurer la livraison ! C’est impressionnant et rapide. En trente secondes, c’est bouclé. On a de la chance car cela n’arrive que toutes les six semaines.

C’est reparti pour le passage du deuxième col de la journée. Les cabanes sont moins nombreuses sur cette partie du GR10 mais nous allons essayer de faire coïncider nos étapes avec les quelques-unes restantes. Le soir, nous atteignons celle du Rouzet. Très petite et sans mobilier, nous posons nos matelas à même le sol, et ça sera parfait pour cette nuit.

Au matin, la route est plate. Oui plate, c’est assez fou pour être mentionné. On avance à bonne allure, survolés par d’impressionnants exercices de l’armée de l’air. Quelques marmottes surveillent aussi notre progression. Arrivés à Superbolquère, Vincent part faire des courses tandis que Laura va s’installer au bord de l’étang du Ticou. Le coin est sympa, il y a une fontaine d’eau potable, des tables de camping, des toilettes. On décide de rester pour la soirée. Qui dit jour de ravitaillement dit orgie, c’est donc le ventre bien plein que nous passons l’après-midi à étudier l’itinéraire des prochains jours.

Le compte des jours s’égraine, le retour approche. Il revient souvent dans nos conversations. Nous sommes partagés, entre l’envie retrouver un peu de confort et celle de rester sur la route. Car une fois rentrés, nous savons pertinemment que tout ça va nous manquer, même si là, ça ne nous semble pas évident.

Nous avons allégé nos journées de marche pour profiter au maximum. Nous arrivons tôt à la cabane. Le refuge de l’Orri n’a pas le charme des cabanes ariégeoises mais une fois les tâches logistiques terminées, on savoure une après-midi au soleil, tranquille, entre lecture et farniente.

Encore une journée de passée, le temps s’accélère, le départ se rapproche. Il devient omniprésent dans nos discussions. Nous passons le col de Mitjat. Après la descente technique, un petit passage en forêt nous offre notre troisième récolte de champignons. Lorsque nous arrivons à la cabane de l’Alemany, deux jeunes sur le départ nous offrent des cafés et un cake aux fruits. Ca fera un chouette goûter. La cheminée nous offre l’occasion de tester une recette de cèpes en papillote au feu de bois. Verdict : délicieux ! Nous sommes une fois de plus seuls dans la cabane, où on fait notre petite vie comme à la maison.

Passage du Col de Besines, Pyrénées Orientales Ravitaillement d'un refuge par hélicoptère Col Coma d'Anyell, Pyrénées Orientales Laura descendant la vallée Une marmotte attentive Lac de Bouillouses, Pyrénées Orientales Pause lecture au refuge de l'Orri Col Mitja, Pyrénées Orientales Feu de cheminée dans la cabane d'Alemany, Pyrénées Orientales

S’en suit le village de Mantet. Magnifique mais isolé, il ne nous permet pas de racheter à manger. Peu importe, nous passons près d’un refuge gardé plus tard dans la journée où on se réapprovisionne en pain. À proximité, deux cabanes s’offrent à nous. Une grande bien retapée mais déjà pas mal investie par un groupe d’alpinistes, ou une petite plus spartiate. L’idée d’être tranquille nous séduit. On pose les sacs et on allume un petit feu. À l’ombre de la montagne, le froid tombe vite.

Nous continuons en direction du chalet de Cortalets. En route, on croise un randonneur tout nu. À l’aise, le bonhomme fait même un brin de causette avant de repartir les fesses à l’air et le sourire aux lèvres. Le chalet de Cortalets ne propose pas de ravitaillement malgré la large carte de son restaurant, dommage… Nous atteignons enfin l’abris du Pinatel, une petite cabane refaite à neuf, bien mignonne. Des touristes s’arrêtent par curiosité mais aucun randonneur ne nous rejoindra ce soir encore.

Nous sommes dimanche et l’unique commerce d’Arles le Tech ferme à midi et demi. Notre niveau de provisions nous motive à presser le pas. À 6h30, nous sommes déjà en route pour ne pas rater notre coup. En autonomie, il reste assez difficile de se ravitailler, même si c’est moins pire qu’en Ariège. Mais mission accomplie ! Et c’est bien installés à l’ombre que nous savourons un copieux repas.

Arles le Tech était notre dernière ‘ville’ étape. Un cap est franchi. Inconsciemment notre petit compte à rebours nous dit que l’on approche de Banyuls-sur-mer. J-4. On se remet en route, l’orage menaçant. Nous passons entre les gouttes mais aucun spot de bivouac en vue. Nous sommes forcés de continuer notre route jusqu’à 21h où nous arrivons dans un tout petit village, composé d’une maison et d’une église. C’est finalement dans cette dernière que nous trouvons refuge, le gardien nous autorisant à y passer la nuit.

Sans tente à plier, le départ est rapide. La route à travers la forêt est sympa mais toutes les sources qui étaient indiquées sont à sec. Nous sommes contents d’arriver à Las Illas où une petite aire de bivouac dans le village nous accueille pour la pause déjeuner. Un point d’eau, des tables ombragées et même une douche, c’est le grand luxe ! Après une petite sieste, on reprend la route même si le coin nous fait de l’œil, surtout la douche.

Nous suivons un sentier le long de la frontière. Il n’y a pas d’eau et pas vraiment de coin pour bivouaquer. Finalement nous tombons sur un couple installé au bord du chemin dans un petit bois. Ils nous aident à débroussailler un coin pour planter notre tente. Nous papotons un peu et sommes rejoint par un troisième randonneur lui aussi en quête d’une place pour sa tente. Ce soir, c’est ambiance camping improvisé. Le matin, nous sommes les derniers à partir. Après 40 jours sur le GR10, cette nuit sera la der des ders. La route est agréable, une pente douce à l’ombre nous fait avancer d’un bon pas jusqu’au pic de Neulos.

Nous arrivons tôt au refuge de Tagnarède, contents d’avoir le temps de profiter de cet après-midi au calme pour réaliser. Depuis le pic, nous avons vu la mer. La fin du voyage est proche. Demain, c’est fini. Il fait bon mais Laura décide de faire un dernier feu dans la cheminée. Chacun ses petits plaisirs. La cabane, qui est accessible facilement depuis la route, est assez sale. Nous décidons de ranger un peu et de passer le balai, comme à la maison une fois de plus !

Une soirée en solitaire se dessinait mais un randonneur tout frais nous rejoint à l’heure du repas. Premier jour pour lui, dernier jour pour nous. Il ne comprend pas bien pourquoi il y a un feu dans la cheminée mais qu’importe. Un brin songeur, nous regardons les bûches se consumer dans l’âtre. Dernière soirée, c’est difficile de réaliser…

La météo fait son baroude d’honneur et décide que nous n’allons pas nous en tirer à si bon compte, ce matin le vent est violent et la visibilité nulle. On ne voit pas à un mètre et nous nous perdons plusieurs fois. Impossible de voir le balisage dans cette purée de pois. Arrivés au dernier col, le temps se dégage enfin, juste à temps pour voir la mer au loin. Ça y est, c’est la fin, on ne réalise toujours pas. Incrédules, nous suivons la route le long des côteaux de vigne. Le soleil est revenu, les maisons apparaissent et nous voilà au centre ville de Banyuls-sur-mer.

Cabane de Mariailles Laura allume un feu de camp Cabane de Mariailles, Pyrénées Orientales Mer de nuages Pic Neulos, Pyrénées Orientales Rencontre de chèvres espagnoles et vaches françaises Vue sur Banyuls-sur-mer Fin du GR10

800km pour 40 jours de marche, une belle balade quoi !

La plaque mythique devant la mairie signe la fin de cette belle aventure. Trois douzaines d’essais photo plus tard, c’est l’heure de manger. On ne réalise pas vraiment que c’est fini. La mer est pourtant là devant nos yeux mais rien à faire, on ne se rend pas compte que ce soir nous ne dormirons pas dans la montagne, sous la tente ou à l’abri d’une cabane. Il est alors temps de prendre le chemin de la gare. On hisse notre sac sur notre dos pour la dernière fois… pour cette fois !

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